Aller « Vers le phare » en compagnie de Virginia Woolf

Commencer l’année en lisant Virginia Woolf, c’est prendre le temps d’être présent au temps : le temps qu’il fait, le temps qui passe, le temps intérieur. C’est l’assurance de ne pas être pris pour un gogol par les têtes de gondole de l’industrie culturelle. C’est débrancher la télé, sortir du train de la série Netflix en cours, faire la nique aux poncifs. C’est un assouplissement de l’esprit, comme un exercice de méditation. 

Une phrase du roman s’applique à merveille au bienfait que procure la lecture de l’autrice anglaise : « Des hommes, et des femmes aussi, oubliant pour un temps la complexité des choses, avaient connu auprès d’elle le soulagement de la simplicité. »

Vers le phare n’est pas un lieu commun. C’est un voyage. 

La traversée jusqu’à cette terre fabuleuse où s’anéantissent nos plus belles espérances, où nos frêles esquifs s’abîment dans les ténèbres, est un voyage qui exige avant tout courage, probité, et patience dans l’épreuve.

Nous voilà sur une île écossaise, à la veille de la Première Guerre mondiale. La famille Ramsay est en villégiature. Le plus jeune fils rêve d’une expédition au phare. Sa mère dit oui ; pour son père il n’en est pas question. Ravissement et déception se succèdent brutalement : « … elle était sûre qu’il pensait : demain on ne va pas au Phare ; et elle pensa : il s’en souviendra toute sa vie. » 

À partir du choc d’un désir d’enfant contre l’implacable réalité, Virginia Woolf déroule la trame intime de la vie de ses personnages, membres de la moyenne bourgeoisie ; avec en ligne de mire, la rayonnante Mrs Ramsay ; et en ligne de fuite, le phare qui se détache au loin. L’autrice semble ainsi se concentrer sur un détail grossi à la loupe d’un tableau plus vaste, celui de « La » vie elle-même.

Portrett av forfatteren Virginia Woolf

Son génie consiste à capter, au niveau le plus primitif, les vibrations d’être de chacun de
ses personnages, pour nous les faire voir sous un jour nouveau, amusant à force d’étrangeté : un mari insatisfait qui n’en finit pas de tourner d’un bout à l’autre de la terrasse pour obtenir ce qu’il veut ; une femme forte et vertueuse mais avec un faible pour l’amour ; un couple qui se forme, un autre qui restera platonique ; des enfants qui courent ou rêvent dans leur chambre ; un pauvre étudiant dont la raideur compassée est la cible du mépris social ; une jeune fille qui perd sa broche (et sa vertu ?) à la plage ; toutes les pensées non formulées d’une grande tablée, semblables à un nuage bigarré qui planerait au-dessus des têtes des convives ; une mère qui endort son enfant en lui susurrant des mots qui font rêver comme « antilope » ; des personnages qui lisent ; une vieille fille qui peint, tourmentée par son sujet.

Deux mois... l'éternité !
Ce qui me permet de faire un clin d’oeil à ce beau livre illustré par une amie talentueuse

Le sujet principal, c’est le temps. La première partie fleure bon l’intemporalité des vacances, de l’enfance. « Le temps dure longtemps / Et la vie sûrement / Plus d’un million d’années » chante Nino Ferrer dans Le Sud, une chanson qui pourrait être un peu la BO de Vers le phare. Virginia relativise à sa façon : « Le moindre caillou que l’on frappe du bout de sa chaussure survivra à Shakespeare ». Mais il y a aussi une certaine angoisse : « Elle se disait : la vie – et aussitôt un petit ruban de temps se présentait à ses yeux ».

Puis la vie semble s’arrêter dans la deuxième partie : rideau. C’est alors le temps de la guerre, point de rupture de l’harmonie que faisait régner Mrs Ramsay. La maison de vacances se dégrade insensiblement sans ses occupants. Cette partie, la plus courte, ressemble à ces séquences de cinéma qui veulent montrer en peu de temps le passage de plusieurs années, avec des images qui tournent très vite et des ellipses. La troisième et dernière partie a des parfums de « temps retrouvé », de renaissance. Certains personnages parviennent finalement au bout de leurs désirs, des années après. 

Quel est le sens de la vie ? Rien d’autre – question simple, qui semblait se faire plus pressante au fil des années. La grande révélation n’était jamais arrivée. En fait la grande révélation n’arrivait peut-être jamais. C’étaient plutôt de petits miracles quotidiens, des illuminations, allumettes craquées à l’improviste dans le noir.

Mais dites-moi : faites-vous partie de la team La promenade au phare (titre français le plus couramment retenu) ou de la team Vers le phare (titre de la traduction de Françoise Pellan) ?  En anglais, le titre original est To the Lighthouse, donc la première option, retenue par les éditions Folio, paraît la plus adéquate. D’autant que l’appel du Phare, qui s’exerce plus ou moins sur tous les membres du cercle des Ramsay, ne s’accomplit jamais totalement. Ce n’est pas une simple promenade, une partie de plaisir, mais une réponse sans cesse ajournée à l’appel du large, un combat contre les forces de mort et pour la vie en germe. Les personnages sont toujours mouvement, en évolution,  et le titre Vers le phare traduit bien cette progressivité. Ou alors, on pourra choisir Voyage au phare des éditions du Livre de Poche, qui évacue au moins le côté anodin de la promenade. Sauf que, j’ai lu dans la préface ou ailleurs, que « To the lighthouse » peut être lu comme une adresse, une dédicace, comme on mettrait « à mon cher époux » au début d’un livre. Du coup, faudrait-il traduire Au Phare comme les éditions Stock ? On aurait en plus cette notion d’allant, comme les sans-culottes auraient pu dire « à la Bastille ! » Mais je trouve ce titre moins euphonique, plus sec, c’est même pour moi un contresens car finalement le lieu même du phare n’occupe qu’une place minime dans le livre (d’ailleurs, toutes les couvertures n’affichent pas l’image du phare – à ce propos, j’aime bien celle du Livre de Poche où l’on voit Lily Briscoe en train de peindre).

Au phareLa Promenade au phare par WoolfPromenade au phare par [Woolf, Virginia]To the LighthouseCover for To the Lighthouse

Lily Briscoe. Pendant de Mrs Ramsay, autre spécimen d’humanité féminine (elle serait Lilith quand Mrs Ramsay serait Ève), elle va me permettre de redire combien Virginia Woolf est moderne – et drôle.

Virginia Woolf est moderne car elle nous parle de la force du désir, et des chemins détournés par lesquels il opère. Chacun peut se sentir touché personnellement. Elle est moderne en créant le personnage de Lily Briscoe (son avatar ?), femme célibataire qui lutte pour exister et créer en tant que telle. Il lui faut passer outre les réflexions misogynes de son entourage : « … et voici qu’elle entendait Mr Tansley lui murmurer à l’oreille : ‘Les femmes sont incapables de peindre, incapables d’écrire…’ » et chérir sa liberté comme un joyau, le seul qu’elle possède face à Mrs Ramsay et sa couronne d’enfants (elle en a eu huit !) : « … elle revendiquait le droit d’échapper à la loi universelle ; se faisait éloquente ; elle aimait être seule ; elle aimait être elle-même…».

J.-J. SEMPÉ, Adolescente sur le rivage

Enfin, elle est drôle, si drôle, quand elle croque malicieusement les petits ridicules de ses personnages – un peu comme le ferait un Sempé anglais. Leurs interactions, leurs quiproquos, leur quant-à-soi, mis en miroir, arrachent un sourire, voire un rire, au détour d’une phrase plus ou moins innocente. Par là, Virginia nous montre qu’elle est bien anglaise, dans la tradition de Jane Austen !

Et il allait visiter les galeries de peinture, disaient-ils, et il vous demandait si sa cravate vous plaisait. Dieu sait que non, disait Rose.

« Vers le phare » de Virginia Woolf, texte traduit, présenté et annoté par Françoise Pellan, Folio Classique, 1996, 363 p.

Mrs Dalloway, de Virginia Woolf

Woolf-Dalloway.inddJe continue mon mois « Virginia Woolf » (le mois anglais étant ici presque un prétexte pour m’en repaître) avec ce qui est peut-être son oeuvre la plus connue, celle que je  désirais lire depuis si longtemps – et que je dus me résigner à ne trouver, ni dans ma petite bibliothèque villageoise, ni dans les rayons familiaux, ni dans les brocantes (la F**C m’a sauver). Bref, Mrs Dalloway.

Mais avant cela, j’ai envie de revenir un peu sur les racines de cet intérêt que j’ai développé pour l’oeuvre de cette sacrée Anglaise du début du 20e siècle. Au début était donc Virginia Woolf, un personnage que j’ai longtemps cru être de fiction, la faute à un extrait de la pièce de théâtre Qui a peur de Virginia Woolf ?, inséré dans un de mes manuels scolaires. Plus tard, une amie qui lisait Mrs Dalloway justement m’a dessillée les yeux, mais… l’étincelle n’a pas pris (ce n’était pas le moment). Il a fallu un billet de Romanza du mois anglais 2015 pour me jeter à l’eau (et ce furent Les Vagues). Puis successivement, je tombais sur un exemplaire des Années à la bibliothèque spécialisée jeunesse près de chez moi (Mrs Woolf est parfois là où on ne pense pas la trouver) ; je découvrais une édition d’Orlando chez ma grand-mère (avec ses notes au crayon, émotion) ; plus récemment je goûtais à deux de ses nouvelles lues par Emmanuelle Riva (de pures merveilles). C’est ainsi que j’avais, un peu au hasard des « rencontres » avec des livres placés sur mon chemin, commencé à me promener dans cette oeuvre subtile et complexe, d’une poésie intense. Entretemps, la prédilection woolfienne de Lili avait fait son effet puissamment didactique sur moi, et je me languissais de lire enfin ses oeuvres les plus connues (parce qu’il me semblait que dire, ‘ouiii j’ai lu Woolf’, sans avoir lu Mrs Dalloway et La promenade au phare, ça faisait un peu toc – on a de ces snobismes parfois, j’vous jure).

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Yelena Bryksenkova, Mrs Dalloway’s party

Après cette introduction légèrement égomaniaque, place à l’oeuvre. Nous voici projetés dans une belle matinée de juin 1923 (ben oui, c’est le mois anglais !). Clarissa Dalloway est une femme élégante de Londres, versant doucement dans la cinquantaine, qui se prépare à donner une réception chez elle le soir. La narration se concentre sur une journée entière, faisant de cette soirée à l’enjeu si faible, l’apogée de toute l’intrigue. Donc l’essentiel est ailleurs.

Toute la journée de Clarissa est traversée par les souvenirs de ses étés de jeunesse à Bourton et d’un, voire deux, êtres qu’elle a passionnément aimés, ce qui la conduit à remettre en question son mariage avec le plat Richard Dalloway. Rythmée par les heures sonnées par Big Ben, cette journée se fait le symbole d’une vie, avec ses futilités routinières et ses drames qui passent souvent inaperçus. Car n’allez pas penser qu’il ne se passe rien dans la vie d’une mondaine respectable : ce jour-là précisément, Mrs Dalloway retrouve en chair et en os les spectres de son passé. Cela provoque en elle une lancinante réflexion sur la fin de l’existence.

Mais tout cela qui fait la chair intime de Mrs Dalloway est fondu dans les mille et unes choses qui composent une journée printanière. Au milieu d’un dédale de pensées sur l’amour, elle va se mettre à penser au menu du soir ou à sa robe décousue. C’est dans ce nuage de pensées divergentes que nous vivons, n’est-ce pas ? Je trouve merveilleux que Woolf saisisse l’embrouillamini des productions de nos neurones comme sur la plaque sensible d’une pellicule photographique (elle ne le savait peut-être pas mais elle a bien illustré le fait que nous créons près de 60 000 pensées par jour !).

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Yelena Bryksenkova, Mrs Dalloway’s party

Et puis, par un effet de zoom, Clarissa elle-même ne devient que la petite partie d’un tout. Ses flux de conscience vont se mêler à ceux des personnes qu’elle croise : un vieil ami, un commerçant, un inconnu, passant de l’un à l’autre de façon fluide. Scoop : Mrs Dalloway n’est pas tant le personnage principal de cette histoire qu’un point d’entrée pour observer un microcosme. Clins d’oeil en miroir : les personnages nous sont d’abord connus par ce qu’en pensent les autres… l’écart avec la réalité peut être amusant (c’est seulement dans le cas du fat Hugh Whitbread que nous n’avons pas accès à ses flux de conscience, c’est vous dire s’il a l’intériorité d’une huître !). Ce procédé, développé dans les oeuvres postérieures, me semble ici atteindre un point d’équilibre parfait. J’ai admiré la façon que l’auteure a de mêler étroitement la vie matérielle (la circulation dans la rue, l’affairement des domestiques dans les cuisines, les achats dans les magasins) et la sphère abstraite des pensées ou la confusion violente des émotions.

« Mais, disait-elle, assise dans l’omnibus qui remontait Shaftesbury Avenue, elle se sentait présente partout ; pas « ici, ici, ici » (et elle tapotait le dossier de son siège), mais partout. Elle agitait la main, vers Shaftesbury Avenue. Elle était tout cela. » (p. 264)

085fc3ad2ae5e5768ceb49a1ae246d23--virginia-woolf-vintage-illustrationAu départ, je n’ai pas compris pourquoi on s’attardait autant sur le personnage de Septimus Warren Smith, un jeune homme revenu de la guerre et souffrant de désordres post-traumatiques (ses hallucinations sont d’autant plus troublantes qu’on se dit que Virginia Woolf parle peut-être d’expérience). Et puis la fin, la soirée de Mrs Dalloway – ce flop magnifique – me l’a brillamment fait comprendre. Il est caractéristique du côté sombre du roman, qui se manifeste de façon terrifiante chez le docteur Bradshaw (sincèrement, Virginia Woolf devait avoir la phobie des médecins). Mais le personnage que j’ai peut-être préféré c’est celui que personne n’aime : Doris Kilman, cette préceptrice revêche, est un chef-d’oeuvre d’ambiguïté.

Je n’ai pas trouvé ce roman difficile à lire. Certes, il y a un style Woolf dans lequel il faut entrer. Il faut accepter certaines métaphores audacieuses, des parallèles étonnants, un discours indirect libre débridé. Elle nous emmène parfois sur des chemins de traverse. J’ai accepté de ne pas comprendre certains passages. Mais la narration est tellement fluide, les personnages tous intéressants dans leur genre, l’ironie si fine (contre tous les polichinelles qui se donnent de l’importance), que j’ai savouré presque chacune de ses pages. Ce n’est pas une lecture vide-tête, mais un mets très fin  et revigorant à la fois. Comme le dit Lili, pour apprécier ce roman, « il faut soi-même être ouvert à tous ces petits éléments silencieux et d’une infime délicatesse ». J’avais noté pour ma part que l’auteure sollicite beaucoup la mémoire de nos propres sensations intimes afin que l’on puisse identifier celles des personnages.

Un mot sur la traduction, due à Marie-Claire Pasquier : pour avoir parcouru quelques lignes d’autres traductions trouvées en ligne, je l’ai trouvée extrêmement réussie. Elle restitue vraiment le côté ailé, naturel (mais d’une grande précision), faussement insouciant et légèrement inquiétant qui plane sur cette oeuvre. Je crois que c’est celle qui a été retenue pour l’édition de la Pléiade.

Ouf, je peux le dire maintenant, j’ai aimé Mrs Dalloway, elle va même entrer dans le cercle très fermé de mes oeuvres cultes, de celles que j’aimerais relire plus tard pour saisir tout ce qui m’a échappé à la première lecture.

603798_10201054393153035_989092313_nUne 4e participation de justesse au mois anglais (publiée le 30 juin à 23h passées), censée avoir été postée pour la journée « Virginia Woolf »

« Mrs Dalloway » de Virginia Woolf, traduction de Marie-Claire Pasquier, Folio classiques, 2017, 321 p.

 

Six nouvelles de Virginia WOOLF

G01268Il y a quelques temps, Florence m’a proposé la lecture commune d’un joli recueil de nouvelles de Virginia Woolf qui vient de paraître chez Folio sous le titre « Rêves de femmes ». J’ai sauté sur l’occasion de lire des récits courts de la dame, tant j’avais apprécié ceux écoutés en podcast. Accessoirement, c’est une jolie manière de s’initier aux écrits de Woolf pour ceux à qui elle fait peur : le recueil est très mince, d’un prix minime, et il comporte des notes éclairantes de la traductrice Michèle Rivoire.

Au début du recueil, un court essai de Virginia Woolf sur le thème faussement simple « des femmes et du roman » articule la façon dont les femmes sont représentées dans la fiction, et la littérature qu’elles écrivent. Elle pointe des idées qu’elle développera dans « Une chambre à soi ».

« … non seulement les femmes se prêtent moins aisément à l’analyse que les hommes, mais ce qui fait leur vie échappe aux méthodes habituelles par lesquelles nous examinons et sondons l’existence. » (Et donc Virginia va employer des moyens narratifs nouveaux pour parler des femmes).

« Rêves de femmes » est un joli titre. Vu que nous sommes au début de la semaine du Bac, arrêtons-nous sur les deux termes : ‘rêves’ et ‘femmes’. Qui mieux que Virginia Woolf pouvait décrire les rêves, les désirs et les épanchements des femmes ? Qui mieux qu’elle pouvait traduire la soif des femmes de son époque d’être et d’avoir plus que la quote-part qui leur est concédée dans une société dominée par les hommes ? Car les rêves des femmes qui affleurent dans ces nouvelles sont de deux natures : songerie et idéal personnel (et voilà ma problématique !).

Tamara de Lempicka, Jeune fille en vert (1930)

Du côté de la songerie, il y a la première nouvelle du recueil : « Un collège de jeunes filles vu de l’extérieur ». Elle commence à la nuit, dans le calme apparent d’un sage pensionnat. C’est le moment propice pour libérer toute une fantaisie d’images, de souvenirs et d’émotions émanant de la jeune Angela. Au milieu des rires étouffés et des bribes de conversations de pensionnaires censées dormir, elle se remémore une scène qui l’a bouleversée… Nous sommes placés au centre du carrousel de pensées vagues qui tournoient autour de l’insomniaque, jusqu’à la fixation sur le souvenir qui tient le sommeil à distance. Il faut se laisser porter sur les ailes de ce texte poétique sans chercher à tout maîtriser.

« … et Angela, absolument incapable de rester tranquillement assise, le coeur comme dévasté par une tempête, se mit à faire les cent pas dans la pièce (témoin de la scène), bras tendus pour soulager cette fièvre, cette stupeur qui l’avait saisie quand s’était incliné l’arbre miraculeux, un fruit d’or à la cime – ne lui était-il pas tombé dans les bras ? » (p. 29)

« Dans le verger » appartient aussi au sens premier du mot « rêve » puisque « Miranda dormait dans le jardin… » Les choses qui l’entourent la traversent comme si tout s’interpénétrait : rayons du soleil, brise, arbre, cloches, écoliers qui répètent leurs tables de multiplication… Quand brusquement son rêve s’arrête. Mais était-elle vraiment endormie ? N’était-elle pas plongée dans une sorte d’extase, dans un état de demi-sommeil ? L’auteure excelle à nous faire voir la face cachée de la conscience.

« (« Oh, je vais être en retard pour le thé ! » s’écria Miranda), et les pommes reprirent aussitôt leur place contre le mur. » (p.59)

Les quatre autres nouvelles interprètent le rêve comme désir subversif de chose proprement à soi qui ne serait pas définie par les hommes ou la société (même s’il est difficile parfois de séparer le rêve-rêverie, du rêve-désir). Avec beaucoup d’humour, l’auteure démasque les hypocrisies sociales et l’écart entre réalité et préjugés.

« Une société » est le récit picaresque d’un club de jeunes femmes qui décident d’enquêter sur les fondements supposés de la supériorité masculine qu’elles ont intégré malgré elles dans leurs schémas mentaux. Armée, université, clubs, science, littérature, politique, aucune sphère masculine de l’époque n’échappe à leurs regards aiguisés. Et puis certains événements font revoir les ambitions de certaines… Un récit empreint d’un féminisme joyeux et impertinent.

« N’est-ce pas nous qui les élevons ainsi, depuis la nuit des temps, les nourrissant et assurant leur confort afin qu’ils puissent être intelligents à défaut d’autre chose ? C’est notre faute ! » (p. 52)

« Moment d’être : ‘Les épingles de chez Slater ne piquent pas' » décrit une sorte de contemplation intérieure provoquée chez une jeune femme par une phrase anodine de sa professeure de piano. Elle suscite une exploration par petites touches de la personnalité mystérieuse de cette professeure célibataire, et parvient à révéler tout en finesse une vie vécue en-dehors des normes sociales.

« L’espace d’un instant, tout parut transparent à ses yeux, comme si, au-delà de Miss Craye, Fanny Wilmot apercevait la source d’où son être jaillissait en pures gouttes d’argent. » (p. 70)

Je rejoins Florence (l’intérêt de publier mon billet en retard) sur le fait que « Lappin et Lapinova » est le conte cruel d’un couple de jeunes mariés, pris dans les rets d’une fiction infantile. Les désillusions du mariage sont ainsi abordées par Virginia (qui s’en est fait une spécialité).

« ‘Prise au piège, dit-il, tuée’, et il s’assit pour lire le journal. » (p. 85)

Et de fait, « Le legs » qui clôt le recueil montre qu’on peut fortement s’illusionner sur les apparences de son propre mariage. C’est une nouvelle différente des autres, plus classique avec ses personnages semblant sortis d’un théâtre et sa chute fracassante. Presque une mini-intrigue à la Agatha Christie !

« Et pourtant, comme c’est étrange, se répéta-t-il, qu’elle ait tout laissé en si bon ordre. » (p. 86)

Un régal que de picorer ces textes courts et lumineux, reflétant chacun les différentes facettes d’une même agathe !

Filez voir le billet de Florence avec qui j’ai fait cette lecture commune. (Et qui est-ce qui a loupé le jour de la publication qu’elle avait elle-même fixé ? C’est Bibi ! :/ )

L’image contient peut-être : 1 personne, bébé et texteDeuxième participation au mois anglais, pour le jour « Vintage Classics » (so chic, isn’t it?)

« Rêves de femmes » de Virginia Woolf, Folio classique, 2018, 144 p.

Virginia Woolf, Orlando

« Heureuse la mère qui porte un tel être ! Plus heureux encore le biographe qui raconte sa vie ! L’une n’aura jamais à s’affliger, ni l’autre à demander le secours du romancier ou du poète ! « 

Ma version, un recueil annoté au crayon par ma grand-mère 😍

Je me dépêche d’écrire un petit billet sur « Orlando », que je n’ai pas encore fini, mais je souhaitais absolument participer à la LC Virginia Woolf de l’incontournable mois anglais ! Il faut dire que je l’ai commencé il y a 4 jours et Mrs Woolf n’est pas le premier page-turner venu, que l’on engloutit en un après midi. Mrs Woolf tisse une soie miroitante et pleine de détails que l’on a plaisir à découvrir avec lenteur et émerveillement. Et pourtant, et pourtant, « Orlando » est un roman virevoltant, sautillant et plein d’autres qualificatifs en « an » qui font penser au vent qui soufflète dans les feuilles (mon Dieu ! Ça y est, la folie des comparaisons dont parle le narrateur d’Orlando me guette !)
Il faut dire que j’en suis arrivée au moment où Orlando, d’homme est devenu femme. J’ai atteint le coeur du propos de la « biographie » écrite par Woolf, à savoir l’androgynie. Biographie certes complètement fantaisiste, puisque Orlando traverse les siècles aussi bien que la barrière des sexes. Jeune et beau gentilhomme de l’ère élizabétaine, il ou elle atteint à la fin l’époque de sa biographe, 1928. Mais il ne faudrait pas penser que la mention de la biographie n’est qu’un accessoire sans importance. Woolf a beaucoup mis d’elle-même dans ce personnage il me semble, même s’il paraît que c’est un portrait de son amie de coeur (et un peu plus), Vita Sackville-West. Orlando est gauche et timide, même s’il remporte de grands succès à la cour et en amour. Il est pétri de contradictions : atteint du « mal de la littérature », il ambitionne d’entrer au panthéon des lettres anglaises, puis comprend que l’obscurité lui laisse plus de liberté que la pleine lumière. Son devenir femme ne simplifie pas les choses mais lui permet de comprendre enfin l’attitude de son premier grand amour, la jolie Sacha, et les ruses auxquelles doivent se livrer les femmes qui veulent vivre selon leur bon plaisir. C’est la cause de la vie même de Virginia Woolf qui aimerait joindre en elle-même les avantages des deux sexes (sans leurs inconvénients !)
Woolf, prenant la voix à la fois docte et amusée d’un biographe courant après son modèle, nous entraîne à notre tour sur les pas d’Orlando, en Angleterre, en Turquie ou en Grèce, en ville ou à la campagne, mêlant pensées profondes et notes d’humour. C’est hautement fantaisiste, on sent que Woolf a laissé courir sa plume sans contrainte, et pourtant j’ai sauté dedans à pieds joints ! Le tout dans une langue toujours gracieuse. Peut-être vaut-il mieux que je lui laisse la parole…

« La lande était à eux et la forêt ; le faisan et le daim était à eux ; le renard, le blaireau et le papillon. »

« Ainsi, sa lanterne à la main, après avoir vérifié que tous les ossements étaient en ordre – car si Orlando était romanesque il était aussi singulièrement méthodique et ne détestait rien tant qu’une pelote de ficelle sur le sol, à plus forte raison le crâne d’un ancêtre…« 

« Sur l’homme obscur est répandue la très gracieuse effusion de l’ombre. (…) Longtemps il resta perdu dans sa méditation sur la valeur de l’obscurité, la joie de n’avoir point de nom, d’être comme une vague qui revient se confondre avec le corps profond de l’océan… »

« Elle se souvint que, jeune homme, elle avait exigé des femmes qu’elles fussent obéissantes, chastes, parfumées et revêtues d’atours délicieux. « Pour ces désirs d’antan, réfléchit-elle, je devrai désormais payer de ma propre personne, car les femmes (si j’en crois mon expérience naissante, ne sont naturellement ni obéissantes, ni chastes, ni parfumées, ni revêtues d’atours délicieux.« 

« Mon seul droit, dès que j’aurai posé le pied sur le sol anglais, sera de servir le thé en demandant à ces messieurs comment ils l’aiment. « Le sucrez-vous, Monsieur ? Avez-vous accoutumé d’y mêler de la crème ?« 

Je joins ici le billet consacré à Orlando par Lili, mon maître à penser pour tout ce qui concerne Woolf ! Ce billet est d’ailleurs éblouissant et va bien plus loin que le mien sur tout ce qui fait le sel de ce roman.

No automatic alt text available.Participation à la LC Virginia Woolf du marvellous Mois Anglais.

 

Virginia Woolf, Les Années

« Que c’est agréable de n’être plus jeune ! Agréable de ne plus se préoccuper de ce que pensent les gens ! On peut vivre à sa guise… quand on a soixante-dix ans. » (p. 525)

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D’après mon expérience, les romans se partagent en deux catégories (avec une infinité de variations entre les deux). Il y a d’abord les romans qui nous embarquent facilement dans leur histoire ; le lecteur est plutôt passif et n’a qu’à se laisser porter par la vague ; nous avons ici affaire aux page-turner, aux romans-détente, aux romans d’aventures à rebondissements, aux polars bien troussés. Et puis il y a les romans qui exigent une participation active du lecteur, qui l’invitent à s’approprier les images, les sons, les sensations décrites, à les faire siennes. Ceux-là ne se laissent pas facilement cerner au départ, mais au bout d’un certain nombre de pages ils déploient une grande puissance d’envoûtement (s’ils sont bons évidemment). Au risque de tomber dans le comble du cliché, dans le second cas on trouve typiquement la Recherche de Proust. Les premiers peuvent nous laisser un peu sur notre faim, un peu vides, lorsqu’on les termine, car ils fonctionnent sur le mode de l’addiction. On sort des seconds plus enrichis, avec un sentiment de plénitude, comme si l’on était parvenus au sommet d’une montagne. Les deux catégories sont nécessaires à mon équilibre 😉

Si Les Années de Virginia Woolf appartient à la seconde catégorie sans hésitation (le contraire eut été étonnant), il est quand même d’une facture beaucoup plus classique que Les Vagues (qui faisaient « dialoguer » les fors internes de ses « personnages »). Les Années ce sont tout simplement les années qui s’écoulent entre 1880 et 1930 et quelques, le temps de voir vivre et se croiser trois générations d’une même famille, les Pargiter. Du grand-père colonel à sa petite-fille médecin, en passant par sa fille suffragette, son fils avocat, la fille qui a épousé un Irlandais, le fils qui est parti au loin, la fille aînée qui est restée vieille fille pour s’occuper de son père (ils sont 7 ou 8 enfants, je ne les ai pas comptés), leur cousine riche, leurs cousines pauvres, etc etc. Leur monde : Londres, Oxford, la campagne anglaise, les réceptions, le voyage aux Indes, les réunions associatives, le déclassement vers les bas quartiers de Londres.

La guerre, les nouveautés technologiques, une mèche blanche ou un embonpoint qui pointe, un décès, sont autant de signes qui forgent l’impression du temps qui passe : les heures, les jours, les années défilent comme dans un carrousel. Tout y passe, y compris les événements les plus minimes. Et d’ailleurs, les grands événements de la Grande Histoire nous sont à peine suggérés, incidemment, au même titre qu’un dé à coudre perdu dans les plis d’un fauteuil. Il faut comprendre que quand Rose se prend une pierre et fait de la prison, c’est parce qu’elle revendique le droit de vote pour les femmes (du moins j’ai cru le comprendre, mais évidemment je n’en suis pas sûre à 100%). De très nombreuses allusions percent dans ce roman fourmillant, et dévoilent autant de critiques du système social où s’insèrent les personnages, mais elles sont tellement elliptiques qu’on pourrait ne pas y prendre garde, et rire simplement de la vieille bonne congédiée et marmonnante, quand il s’agit de bien plus que cela.

L’écriture de Virginia Woolf est géniale, je crois que quiconque s’y intéresse partage cette affirmation. C’est même l’intérêt principal du roman, plus que l’histoire en elle-même. (Petite parenthèse : ce doit être une question de traduction mais ici j’ai eu l’impression que cette écriture était plus légère et anodine que dans Les Vagues traduites par Yourcenar). Toujours est-il que par son écriture, même filtrée par la traduction, Woolf porte un regard à la fois naïf et incisif sur les choses les plus triviales du quotidien, ce qui les rend tout d’un coup insolites. Elle embrasse dans une même phrase ou un même paragraphe les choses et les personnes les plus lointaines. Les flux de pensée des personnages se marient harmonieusement avec la mécanique invisible de l’univers. Elle relie des choses en apparences très différentes mais qui semblent d’un coup fonctionner en syntonie.

« Il pleuvait. Une pluie fine, une légère averse, saupoudrait les pavés et les rendait gras. Cela valait-il la peine d’ouvrir son parapluie, de faire signe à un cab ? se demandaient les gens au sortir du théâtre, en levant les yeux vers le ciel calme, laiteux, et ses étoiles ternes. (…) Cela valait-il la peine de s’abriter sous l’aubépine, sous la haie ? semblaient se demander les brebis ; et les vaches, déjà au pacage dans les champs gris, sous les buissons incolores, continuaient à ruminer, à mâchonner, d’un air endormi, avec des gouttes de pluie sur leurs flancs. » (p.99)

Elle a un don pour transcrire les dialogues : ce ne sont pas les dialogues bien écrits, enlevés, plaisants à lire, du roman romanesque de bon aloi. Ce n’est pas ainsi que nous parlons dans la vraie vie, n’est-ce pas ? Quand nous parlons, nous commençons une phrase sans la finir, nous interrompons notre interlocuteur, nous divaguons… Eh bien il semblerait que Woolf ait branché sa petite caméra secrète pour surprendre ces conversations sans queue ni tête de la vraie vie et les retranscrire… Même si en réalité, elle a dû les travailler soigneusement ! Et elle s’en amuse la coquine !

« Toutes les conversations seraient absurdes, je pense, si on les mettait par écrit », fit-elle en remuant son café. Maggie arrêta sa machine un instant et dit avec un sourire : « Même si on ne le fait pas. » (p. 240)

Voire même, elle s’immisce carrément dans le roman à la toute fin, avec cette phrase, au beau milieu d’un dialogue, comme si la romancière qu’elle est disait : « zut à la fin de me fatiguer à reproduire leurs stupides conversations ! » :

« C’est facile pour vous qui habitez Londres… », disait-elle. Mais l’ennui de noter les paroles des gens c’est qu’ils racontent tant de bêtises… des vraies bêtises. » (p. 444) Si vous le dîtes, Mrs Woolf !

Elle excelle à rendre compte des tours et détours de la pensée de quelqu’un qui rêvasse :

« Qu’elle était ignorante. Par exemple, cette tasse – elle la tint devant elle. De quoi est-elle faite ? d’atomes ? Et que sont les atomes, comment adhèrent-ils les uns aux autres ? La surface dure et unie de la porcelaine avec son motif de fleurs rouges lui apparut soudain comme un merveilleux mystère. » (p. 221)

Elle montre le sentiment d’oppression que ressentent beaucoup de femmes en société, et l’échappatoire, le sentiment de libération que représentent les transports modernes pour elles :

« Au milieu de la circulation, elle distingua un véhicule rebondi. Dieu soit loué, sa teinte était jaune. Dieu soit loué, elle n’avait pas manqué son omnibus. Elle fit un signe et grimpa sur l’impériale. Elle poussa un soupir de soulagement, lorsqu’elle remonta sur ses genoux le tablier de cuir. La responsabilité passait entre les mains du conducteur. Elle se détendit et respira la douce atmosphère de Londres. » (p. 152)

« Juste à temps, se dit Kitty, debout dans son compartiment. Elle avait peine à croire qu’un monstre si formidable pût s’élancer si doucement pour entreprendre un tel parcours. Elle vit le buffet reculer. Nous voilà partis, se dit-elle, en se laissant tomber sur la banquette. Nous voilà partis. Toute la tension de son corps se relâcha. Elle était seule ; et le train roulait. On dépassa la dernière lampe du quai. La dernière silhouette s’évanouit. Quelle joie ! se dit-elle, comme si elle était une petite fille échappée à sa nurse. Nous voilà partis ! » (p. 352)

« Eleanor ferma le livre. Je le lirai un de ces jours, se dit-elle. Lorsque j’aurai mis Crosby à la retraite et que… Prendrait-elle une autre maison ? Voyagerait-elle ? Irait-elle enfin aux Indes ? Sir William se mettait au lit dans la chambre voisine. Sa vie à lui se terminait, elle commençait la sienne. Non je ne chercherai pas à m’installer dans une autre maison. Certainement pas, songea-t-elle, considérant la tâche au plafond. De nouveau elle eut la sensation du navire qui clapote doucement à travers les vagues, du train qui se balance de côté et d’autre, le long des rails. Les choses passent, se transforment, se dit-elle, les yeux au plafond. Et où allons-nous ? Où cela ? Où cela ?… Les papillons de nuit s’élançaient autour du plafond ; le livre glissa à terre. Craster a gagné le cochon, mais qui donc a eu le plateau d’argent ? Elle rêvassait, fit un effort, se retourna pour souffler la bougie. L’obscurité régna. » p. 288

Et aussi le décalage, la brèche temporelle que produisent notamment les technologies modernes :

« Elle semblait rassembler deux images de son cousin ; sans doute celle du téléphone et celle qui lui apparaissait dans le fauteuil. Ou bien en existait-il une autre ? Cette façon de connaître les gens à demi, d’être à moitié connu soi-même, cette sensation de l’œil qui se pose sur la chair, comme une mouche qui rampe, c’est bien désagréable, se dit-il, mais impossible à éviter après tant d’années. » (p. 401)

« – J’ai dit : est-ce un oiseau ? Non, je ne crois pas. C’est trop gros. Cependant ça avance, et subitement, j’ai pensé : C’est un aéroplane. Et c’était vrai. Tu te souviens, ils avaient survolé la Manche peu de temps auparavant. J’étais avec vous dans le Dorset quand j’ai lu cela dans le journal. Alors quelqu’un, ton père je crois, a dit : ‘Le monde ne sera plus jamais le même à présent.' » (p. 419)

Et enfin, Woolf a beaucoup d’humour (si, si !) qui se manifeste soit par de l’ironie, un effet de grossissement des petites manies des gens par exemple, ou la moquerie des convenances de l’époque, soit dans certains dialogues d’une grande drôlerie, comme celui-ci :

« J’étais seule, assise, j’ai entendu la sonnette, je me suis dit : C’est la blanchisseuse. Des pas montaient l’escalier. North est apparu. North. » Sara porta la main à sa tête en manière de salut. « Il avait cet air-là… ‘Pourquoi diable ?’ ai-je demandé. ‘Je pars demain pour le front’, m’a-t-il dit en claquant les talons. ‘Je suis lieutenant du…’, je ne sais plus… régiment royal d’attrapeurs de rats ou quelque chose de ce genre. Et il a posé sa casquette sur le buste de notre grand-père. ‘Combien de morceaux de sucre réclame un lieutenant des régiments royaux des attrapeurs de rats ?’ ai-je demandé. « Un. Deux. Trois. Quatre ?‘ » (p. 370)

Voilà, voilà, j’espère, avec cette petite collection de citations, vous avoir donné l’envie de vous plonger dans ce roman, et bien d’autres, d’une romancière que je découvre petit à petit (et dans son cas, il est précieux de prendre son temps pour savourer). Merci à Lili qui donne sur son blog de passionnée woolfienne tant de clés de lecture de cette oeuvre ! Par exemple ici, ici et ici.

« Les années » de Virginia Woolf, traduction de Germaine Delamain et Colette-Marie Huet, préface de Christine Jordis, Folio classique, réédité en 2008, 452 p.